L’union de fait : mythe et réalité

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Par Marie Ève Plante-Hébert

Ceux qui croient qu’en ne se mariant pas, soit civilement ou religieusement on se soustrait de toutes les obligations entre époux, auraient tout intérêt à démystifier ce qu’est véritablement l’union de fait. Quoi qu’ils aient en grande partie raison, il ne faudrait pas qu’ils oublient que la rupture de l’union de fait entraîne certains effets spécifiques prévus par la loi.

Tout d’abord, il faut analyser la constitution de l’union de fait. C’est le seul fait que deux personnes de sexes différents vivent maritalement, comme mari et femme, qui constitue l’union de fait. La cohabitation est donc un critère important, car la durée de celle-ci peut être relativement courte et être tout de même considérée comme union de fait (1 an). Mais cette cohabitation n’est pas l’unique critère. En effet, la jurisprudence n’a pas voulu pénaliser les personnes de sexes différents cohabitant ensemble comme de simples colocataires. Ce sont donc ici les facteurs de soutien et d’échanges de services qui entrent en ligne de compte. L’union de fait ne requiert aucunement la possession d’état d’époux i.e. le fait d’être considéré par son entourage comme étant mari et femme.

De plus, la jurisprudence tend à accorder aux personnes de même sexe les mêmes droits et obligations qu’aux personnes de sexes différents. À cet effet, l’Assemblée nationale du Québec a adopté, le 10 juin 1999, le projet de loi 32 (Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait, L.Q. 1999, c. 14) De par cette disposition et de par la considération des tribunaux, les conjoints de même sexe peuvent désormais être considéré comme conjoints de fait.

L’absence de régime matrimonial est une des caractéristiques de l’union de fait. Cependant, les concubins ont tendance à former des sociétés de fait -apport en argent, en biens ou en travail, partage des risques, pertes et bénéfices. Ces sociétés de fait sont alors réglementées en cas de séparation comme une dissolution de société.

Ainsi, si un des conjoints est resté à la maison pour prendre soin des enfants ou de la maison, ce conjoint aura un recours pour enrichissement sans cause. Par contre, aucune obligation alimentaire ne saurait exister entre les anciens concubins.

Les conséquences de l’union de fait sont presque inexistantes en droit civil. Le législateur a ainsi voulu laisser le choix aux gens qui ne désiraient pas vivre à l’intérieur des droits et obligations qu’entraîne l’état de mariage, de le faire. Cependant, le législateur a laissé libre cours aux personnes qui désiraient réglementer eux-mêmes leur union de fait par le biais du contrat en autant que la clause ne soit pas considérée comme immorale. Par contre, le concubinage peut avoir certains effets en droit civil par le biais de dispositions plus générales, notamment en matière de dommages-intérêts.

En droit social, l’union de fait prend une plus grande place, car elle est considérée dans l’octroi des droits. On peut se référer à toutes les lois qui traitent de l’indemnisation des conjoints.

La partie la plus importante de l’union de fait n’est certes pas l’union en tant que tel, mais bien plus la rupture de celle-ci, ainsi que ses conditions et effets.

Si cette rupture résulte du décès de l’un des conjoints, aucun droit en matière de succession n’est accordé au conjoint survivant, si ce n’est que l’octroi possible de dommages-intérêts suite au décès par la faute d’un tiers. Mais en droit social, le conjoint de fait survivant bénéficie généralement des mêmes droits qu’un époux légal, notamment en ce qui a trait aux rentes et indemnités.

Par contre, si cette rupture résulte d’une séparation, il en va autrement. En droit civil, la rupture n’emporte que quelques effets. Ainsi, le droit au maintien dans les lieux selon l’art. 1938 C.c.Q. est un des effets dont va bénéficier le concubin du locataire à la cessation de la vie commune. De plus, le droit d’usage de la résidence familiale, quoiqu’il ne vise en principe que les époux légalement mariés, a déjà été accordé à un conjoint de fait dans Gagnon c. Angers, C.A. Québec, 500-09-001972-967.

Comme on le constate ici, l’union de fait n’emporte donc pas des effets précis et il peut être discriminatoire ou préjudicieux pour certains conjoints d’être dans cette union. Il serait en effet plus prudent de prévoir un contrat régissant les droits et obligations de chacun et les modalités en cas de séparation pour que chacun y trouve son compte et que personne ne soit pénalisé de par le manque de disposition législative de ce type d’union.

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